MACR 7826
Ce B-24 ne s’est pas écrasé en Ardenne ni même en Belgique, mais son
histoire a attiré notre attention car une de ses photos a été trouvée à Villers-la-Bonne-Eau.
Le 31 juillet 1944,
le B-24 piloté par Emil Berry fut atteint par la flak en bombardant
Ludwigshafen. Le Lt Berry tenta d’atteindre la France avec son avion endommagé,
mais il dut donner l’ordre d’évacuation avant d’avoir atteint ce pays.
EQUIPAGE du 42-52467
Pilote
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Lt
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Emil BERRY
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Tué
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Co-pilote
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Lt
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John B. GOOD
|
Tué
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Navigateur
|
Lt
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Gilbert H. RUBENSTEIN
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PG
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Bombardier
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S/Sgt
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Jack W. WOODS
|
PG
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Mécanicien
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T/Sgt
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Jack W. SANDERS
|
PG
|
Radio
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T/Sgt
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Tom MONSULICK
|
PG
|
Mitrailleur latéral
|
S/Sgt
|
Virgil R. HUDDLESTON
|
PG
|
Mitrailleur latéral
|
S/Sgt
|
John C. CARSWELL
|
PG
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Mitrailleur ventral
|
S/Sgt
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Stanley J. KUDLO
|
PG
|
Mitrailleur arrière
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S/Sgt
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Lewis E. PULSIPHER
|
Tué
|
|
La photo trouvée à Villers-la-Bonne-Eau est en partie
déchirée, mais les visages sont nettement visibles.
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ATTENTION: L’équipage figurant sur la photo n’est
peut-être pas celui qui participa à la mission fatale. Les précisions demandées
au 446e Bomb Group tardent à nous parvenir.
|
La photo entière est parue sur le site b24bestweb.com
Elle est
malheureusement floue et on ne voit pas clairement les deux aviateurs manquants
sur la photo déchirée |
LA DERNIERE MISSION DU « HULA WAHINE II »
Les informations
relatant cette histoire ont été extraites de l’article suivant :
« Du bist als nächster an
der Reihe » Erschiessung von
Fliegern im Raum Saarbrücken
par Klaus Zimmer
Le 31 juillet 1944 est une journée d'été fraîche et le ciel
est couvert. La température est seulement de 15° C.
Une fois de plus, les énormes bombardiers américains sont
en route vers leurs destinations en Allemagne. Près de 1200 bombardiers lourds
(12000 hommes d’équipage) sont en vol et 550 chasseurs les accompagnent.
La première formation survole notre territoire vers midi en
direction de Munich. Suivent alors d’autres bombardiers, environ 500 Liberators
B-24.
A 12h41, ils se trouvent au dessus de Idar-Oberstein, à
12h47 près de Kaiserslautern, à 12h50 près de Grünstatd. Maintenant leur
objectif est clair: Ludwigshafen.
Lorsqu’ils survolaient toujours Kaiserslautern, toutes les
précautions sont prises pour protéger Ludwigshafen. La Flak, intense et précise
comme le spécifie les rapports américains, est prête à tirer sur les avions
venant de l’ouest et sud ouest.
Cependant, toutes ces mesures ne peuvent pas empêcher les
avions de larguer leurs bombes.
Les bombardiers passeront en 3 vagues entre 12h54 et 13h18,
larguant environ 12000 bombes. Il s’agit de la plus importante attaque sur
Ludwigshafen.
La gare et l’usine I.G.Farben furent particulièrement
touchées.
Le « Hula Wahiné II » portant le N° 42-52467 et piloté par
le Lt Berry faisait partie de la formation. Le Lt Berry et ses hommes étaient
en service depuis à peine 3 semaines, mais ils en étaient déjà à leur 8e
mission.
Une exception est Jack W. Woods, le bombardier. Il a été le
premier membre de cet équipage, il effectuait sa 30e mission à la
fin de laquelle il pouvait retourner aux Etats Unis.
Mais le sort en décida autrement, le « Hula Wahine
II » ne revint pas à la base en Angleterre. « Personne ne peut fournir des informations
sur la disparition de cet appareil » indique succinctement le rapport
américain.
Mais
aujourd'hui nous savons ce qui est arrivé.
Ce 31 juillet 1944, le navigateur habituel de l’équipage du Lt Berry
était en formation
de sorte que Gilbert M. Rubenstein, le bombardier, qui avait en plus
des compétences en navigation, se porta volontaire pour le remplacer.
Auparavant, Rubenstein avait déjà assuré le Lt Berry qu’il était prêt à
assurer la fonction de navigateur en cas de nécessité. Le moment était venu de
faire ses preuves.
Comme prévu, le « Hula Wahiné II
» décolla le matin à 09h25 de la base Bungay, et rejoignit la formation à 11h15
au dessus de sur Great Yarmouth. La formation se dirigea alors à 11h44 vers la
côte française à une altitude de 7600 m. Direction: Ludwigshafen.
- Mais les problèmes
commencèrent bientôt, ainsi que le raconte Jack Woods :
« Lorsque la
cible approcha, le système de largage des bombes fut activé, mais les bombes ne
tombèrent pas. Le Lt Berry ordonna alors à notre navigateur Rubenstein de les
débloquer avec la poignée appropriée.
Pendant ce temps, nous volions tout droit et nous ne
suivions plus les autres avions. Juste au moment où les bombes tombèrent
finalement, nous fûmes touchés par la flak ce qui mit les moteurs 3 et 4 hors
service. Notre pilote dut utiliser toute son expérience de pilotage pour
maintenir le B-24 en vol. Nous jetâmes tout ce qui était superflu par dessus
bord afin d’alléger l’avion: munitions, mitrailleuses, vestes anti flak,
équipements de vol. »
Après avoir quitté la formation, le B-24 continua de perdre de
l’altitude malgré toutes les mesures prises. Le Liberator, qui volait
maintenant seul, se dirigeait comme prévu initialement vers le nord ouest en
direction de la Belgique et de l’Angleterre.
A de multiples reprises, le Lt Berry essaya désespérément d’obtenir le
plus rapidement possible de Rubenstein un cap pour se diriger vers une zone de
France occupée par les alliés.
Mais Rubenstein était submergé par cela. Un temps précieux passa.
Lorsque, après 10 minutes, ils se trouvaient approximativement au dessus de
Meisenheim am Glan, ils entamèrent un
virage en direction du sud ouest sur la ligne Idar-Oberstein, St Wendel, Illingen
et Saarbrücken en direction de la France. Mais il était déjà trop tard. Quand
ils furent descendus à 3500 m d’altitude, il ne resta plus au Lt Berry qu’à
donner l’ordre d’évacuation.
- Le mitrailleur latéral
Huddleston raconte:
« Le co-pilote Good se déplaça alors afin de quitter son siège.
Mais Berry lui dit : Reste ici, j’ai besoin de toi pour garder l’avion en
ligne droite. Berry a ensuite repris les commandes pour empêcher l'avion de
partir en vrille. Je partis à l’arrière et j’ouvris la trappe d’évacuation
située dans le fond près de la queue. Le mitrailleur arrière, Pulpisher, quitta
son poste. Le mitrailleur ventral, Kudlo, se signa plusieurs fois. Je vis alors
le bombardier Jack Woods quitter l’avion. Je détachai alors rapidement la prise
électrique de ma combinaison chauffante et je sautai aussi, les pieds en
avant. »
Huddleston atterrit finalement dans le « Eicheneck » près de
Göttschied un quartier de la ville de
Idar-Oberstein. Durant les dernières années, il a plusieurs fois visité Idar-Oberstein
et parlé avec des témoins oculaires.
Woods a aussi atterri près de Idar-Oberstein et il fut conduit le
lendemain au centre d’interrogatoire de Oberursel (près de Francfort) en même
temps que Huddleston.
Kudlo fut capturé près de Hüttigweiler .
Il n’y a pas de détails concernant le cas de l’opérateur radio
Monsulick. Après avoir atterri dans une zone boisée, il entendit trois coups de
fusils, puis encore deux.
Il put encore se cacher 3 jours avant d’être capturé, mais nous ne
savons pas où.
Lors de leur entrée dans la gare de Francfort, Huddleston et Woods
rencontrèrent par hasard leur navigateur Rubenstein accompagné de gardes.
Rubenstein paraissait excité et anxieux et leur cria : « N’oubliez pas que vous m’avez vu
encore vivant ». Il avait peur à cause se son ascendance juive. Par la
suite, cette inquiétude se révéla non fondée.
A Oberursel, l’officier qui les interrogeait leur dit que Berry, Good et Pulsipher avaient été tués par
des civils et que leur avion était tombé à Aachen.
Les informations reçues n’étaient que partiellement vraies. Nous sommes
maintenant en mesure de mieux détailler ce qui est arrivé à Berry, Good et Pulsipher.
Le mitrailleur arrière, Lewis E. Pulsipher atterrit près de Neunkirchen
et fut capturé par la Police de cette ville. Le pilote Emil Berry et le
co-pilote John B. Good restèrent encore quelques minutes à bord du B-24 et
évacuèrent l’appareil seulement près de Saarbrücken.
Le Lt Berry était légèrement blessé. Il fut arrêté par la Police et
conduit au poste de police de Burbach, tandis que Good se retrouva finalement
au poste de Police de Malstatt.
Dans l’après midi du même jour, l’ordre fut donné d’exécuter Berry et
Good sous prétexte de tentative d’évasion.
Le même sort
attendait Lewis Pulsipher, il fut exécuté dans les bois de Bilstock sous le
même prétexte.
Deux mois à peine
avant sa mort tragique il apprit qu’il était le père de deux jumeaux dont il ne
reçut jamais les photos envoyées par sa femme.
Le B-24, le
« Hula Wahine II », arriva jusque Rémeréville où il s’écrasa et fut complètement
détruit. Ce bombardier a donc encore volé seul durant près de 70 km.
Deux noms manquent dans ce récit :
Jack W. Sanders
John C. Carswell
Nous savons qu’ils furent aussi faits prisonniers et
qu’ils survécurent à la guerre, mais aucun détail supplémentaire n’est donné
concernant leur sort à la date du 31 juillet 1944.
INFORMATIONS SUPPLEMENTAIRES
Interview
du S/Sgt Rudy Huddleston.
News Times, El Dorado, Arkansas, Volume 106, Number 32 - By Shea Wilson
(Article paru sur le site du Walker Aviation Museum –
Roswell)
Quand le bombardier
de Rudy Huddleston’s fut abattu en Allemagne en 1944, il était convaincu qu’il
pourrait s’échapper et rejoindre rapidement le territoire allié. Il n’avait
jamais pensé qu’il serait capturé et qu’il deviendrait un prisonnier de guerre.
Il n’aurait certainement jamais imaginé ce qui était arrivé à quelques uns de
ses coéquipiers.
50 ans plus tard,
après avoir découvert que 3 hommes de son bombardier avaient été exécutés après
leur capture, Huddleston fut heureux d’être encore en vie.
Comme étudiant à
l’Ecole Supérieure de El Dorado, Virgil Rudolph « Rudy » Huddleston
devint un membre de le la « Civil Air Patrol », ce qui l’amena à
rejoindre l’armée et devint mitrailleur sur un bombardier.
Ayant terminé son
entraînement, l’équipage de Huddleston arriva dans sa base anglaise dans le
Suffolk, à 113 miles au nord est de Londres. L’équipage fut assigné au 704e
Bomb Squadron du 446e Bomb Group.
Le Bomb Group de
Huddleston effectua des missions au dessus de la France et de l’Allemagne, y
compris des missions de support aux troupes américaines à Saint-Lô en
Normandie.
Le 31 juillet,
l’ordre fut donné d’aller bombarder l’usine chimique I.G. Farben à
Ludwigshafen. Durant cette mission, l’avion de Huddleston piloté par le Lt Emil
Berry fut touché par la flak dans deux de ses moteurs.
« Nous fûmes
abattus » raconta Huddleston dans un interview téléphonique depuis son
domicile de Dallas. Il y eu beaucoup d’avions tellement endommagés qu’ils ne
réussirent pas à rentrer à la base.
« Après avoir eu
deux moteurs hors service, nous commençâmes à perdre de l’altitude.
A ce moment, Berry
dit aux hommes de faire tout ce qui était possible pour alléger l’avion. »
Huddleston dit qu’ils eurent l’ordre d’évacuer l’avion à une altitude de 10000 pieds. Il sauta et traversa des nuages avant
d’ouvrir son parachute et d’atterrir dans un grand sapin. Il se dégagea et
dispersa son équipement sur une grande surface.
Il avait atterri près
de Idar-Oberstein.
« Je fis
exactement ce qu’il m’avait été enseigné dans les cours d’évasion quand on est
incapable de cacher son parachute, car je savais que cela aurait été comme un
drapeau rouge pour ceux qui me chercheraient. Je partis dans une
direction et dispersai mes bottes de vol, ma jaquette et mon écharpe à une
distance de 100 pieds environ. Je retournai alors près de l’arbre, tournai
autour plusieurs fois, puis je partis dans une autre direction en cherchant un
endroit pour me cacher jusqu’à la nuit ».
Huddleston repéra une
sapinière assez dense, il se coucha et se couvrit d’aiguilles.
Il raconta qu'il avait observé un garçon et un homme fouillant
la région et qui hurlaient "hauts les mains" de temps en temps. Mais,
après plusieurs heures, il a commencé à se sentir confiant et pensait qu’il allait
arriver en France.
« Suffisamment
de temps s’était écoulé et je me sentis confiant et capable de commencer à me
déplacer quand il ferait sombre, de me cacher pendant la journée, et de me diriger
vers la France la nuit ».
Mais juste quand il
se mit en route, il fut approché par un petit chien.
« Il n’a pas
grogné, il m’a juste regardé. J'ai reconnu la forme du chien comme un teckel,
mais je n'en n’avais jamais vu avec de
si longs poils et des marques noires et brunes .
Environ une minute
plus tard, un homme plus âgé en uniforme a progressé à travers les branches jusqu'à
ce qu'il soit à deux pieds du chien. Je ne bougeais toujours pas, en espérant
qu'il ne me voyait pas. »
Mais l'homme l'avait
vu.
Cet homme, qui
s’avéra être un forestier, l’arrêta et il fut transféré chez SS qui le menacèrent et l’interrogèrent avant
d’être emmené dans un camp de prisonniers. Il y resta jusqu’à ce qu’il s’évada
le 25 avril 1945 avec un coéquipier. Ils marchèrent de nuit, se cachèrent le
jour et ils atteignirent les troupes américaines de 02 mai 1945.
|
Les équipes de recherche ont capturé Rudy Huddleston (à gauche).
Certains le menacent, mais le forestier se place devant l’aviateur pour le
protéger et le livre à l’Officier de Police |
Après sa capture, on
raconta à Huddleston que le pilote, le co pilote et le mitrailleur arrière de
son équipage avaient été tués par des civils à Saarbrücken et que l’avion
s’était écrasé dans la ville.
Mais après avoir
recherché pendant des années à rassembler les différents informations et après
plusieurs voyages en Allemagne, Huddleston découvrit finalement ce qu’il
s’était réellement passé durant l’été 1944. Un fonctionnaire allemand qui avait
été le témoin des tortures et de l’exécution de plusieurs aviateurs américain
avait signalé les faits.
En 1992, ces
informations furent déclassifiées et Huddleston apprit que 3 hommes de son
Squadron, le Lt Berry, le Lt. John B. Good and le S/Sgt Lewis E. Pulsipher, avaient
été exécutés.
Après la guerre,
trois allemands responsables des tueries furent jugés par la Cour Militaire de
l’Office des Crimes de Guerre et déclarés coupables. Les trois SS furent exécutés
en octobre 1948.
Huddleston raconta
qu’il réalisait à présent qu’il avait eut la grande chance de pouvoir quitter
l’Allemagne vivant. Il avait 19 ans au moment de sa capture et, à cette époque,
il n’avait jamais pensé qu’il pouvait être fait prisonnier.
« Je pensais que
j’allais m’échapper, j’avais eu des cours, j’avais mon kit d’évasion et je
pensais que j’allais réussir. Quand ils nous disaient ce qu’il fallait faire,
ils ne nous dire pas qu’un seul sur 500 réussissait. Je pensais que j’étais
probablement le seul a être capturé, mais quand j’arrivai au camp de
prisonniers, il y en avait plus de 10000.
John
E. MONSULICK
(Article paru sur le
site: http://www.combatvets.net)
John E. Monsulick est né le 25 July 1918 à St. Clair, PA.
Il fut engagé à l’armée le 30 mars 1942. Il reçut une
formation d’opérateur radio/mitrailleur à San Antonio, Texas, et fut assigné
au 446e BG stationné en
Angleterre.
Lors d’un bombardement de Ludwigshaven, en Allemagne, le 31
juillet1944, son B-24 fut sérieusement endommagé par les tirs anti aériens et
l’ordre fut donné d’évacuer l’avion. Le pilote et le co-pilote étaient tous les deux
aux commandes quand ils ont été vus pour la dernière fois, quand le T/Sgt. Monsulick sauta.
Lorsqu’il atteint le sol, il entendit des cris et des coups
de fusil, puis plus rien.
Il échappa à la capture durant 3 jours, mais fut finalement
arrêté par la police civile locale.
Il fut détenu au Stalag Luft IV. C’est là qu’il apprit le
sort de plusieurs de ses coéquipiers, exécutés par les SS. Entre janvier et
février 1945 il fut impliqué dans une marche forcée qui reçut plus tard le nom
de « marche noire ».
Après avoir souffert du froid, de la faim et parfois de
traitements cruels, il fut finalement libéré en mai 1945.
Son B-24 fut localisé près de Rémeréville, en France,
quelques années après la guerre.