lundi 4 novembre 2013

Crash d'un B17 à Cornémont (Louveigné) le 24 décembre 1944

Un fragment d’aile du « Lindy Lou » au musée de la 8e Air Force de Pooler en Georgie USA
B-17  -  N° 44-8192  „Lindy Lou“  487e BG - 838e BS  MACR 11258

Le 24 décembre 1944, le « Lindy Lou » fut abattu en même temps que le « Weary Willie » tombé à Warnoumont. Tous deux appartenaient au 487th BG qui faisait partie du groupe de tête de la plus grande attaque aérienne de la guerre. Ce groupe était composé de 54 bombardiers

4 membres d’équipages furent tués :
- 2Lt Kenneth W. LANG, pilote-Cimetière américain de Henri-Chapelle 
- 2Lt Howard L. MILLER, co-pilote–Cimetière américain de Henri-Chapelle 
- Sgt Donald R. HUCK, radio - Conrad Memorial Cemetery , Kalispell, Montana USA
- S/Sgt Donald C. KAUSRUD,  mitrailleur latéral - Fort Snelling National Cemetery,   Minneapolis, Minnesota, USA

5 membres d’équipage survécurent:
- 2Lt George F. LANG, bombardier
- F/O Samuel ALVINE Jr, navigateur
- T/Sgt James A. WEBER, mécanicien de bord
- Sgt Robert YOWANN, mitrailleur ventral
- Sgt Charles W. HASKETT, mitrailleur arrière 

Voici quelques précisions sur le point de chute de ce bombardier.
(Source : Musée de l’Air de Bruxelles)
Le « Lindy Lou » est bien connu dans la région de Louveigné, et plusieurs articles le concernant sont parus dans les journaux.
Nous avons donc ajouté des informations moins répandues : des extraits du MACR (rapport d’accident) de cet avion, ainsi qu’un article d’un journal américain.

Extraits du MACR 11258. Rapport aimablement transmis par Mr Luc Vervoort.

1-   Témoignage du mitrailleur arrière, le Sgt Charles W. HASKETT, qui revint en Belgique bien des années plus tard.
- L’avion fut abattu par des FW190. Une trentaine de chasseurs nous ont attaqués par l’arrière et par le bas. Nous volions en position #10 du Squadron inférieur et il semblait que nous étions au centre de l’attaque.
- Il me semble que notre avion ne fut réellement attaqué que par deux avions ennemis. Ils étaient vraiment près quand ils ouvrirent le feu, environ 600 yards. Il est possible qu’ils aient utilisé des roquettes, bien que je ne vis pas de trainées. Cependant, il semblait y avoir des flashes à environ 6 à 10 pieds devant les chasseurs, cela provenait probablement de canons de 20mm.
- Le premier chasseur atteignit le moteur #2. Il prit feu et les flammes atteignirent le fuselage.
Le deuxième chasseur atteignit à peu près le même endroit, ce qui augmenta l’importance des flammes qui s’étendirent jusqu’à 15 ou 20 pieds derrière la queue. De nombreuses balles de mitrailleuses atteignirent la queue faisant voler le plexiglas arrière en éclats.
Je me rappelle aussi de longues lignes de trous faites par les projectiles le long du fuselage.
- Tandis que je faisais feu, j’entendis le mitrailleur ventral, le Sgt Yowan appeler le mitrailleur latéral, le Sgt Kausrud et lui dire qu’il était touché. Peu après, j’entendis le mécanicien, le S/Sgt Weber dire « Touché les gars, ça brûle comme l’enfer ». A ce moment, j’essaye d’accuser réception, mais l’interphone se coupe. Je saisis et j’attache mon parachute, puis je rampe vers la trappe de sortie arrière. A ce moment, je suis pris de vertige à cause du manque d’oxygène et je n’arrive pas à actionner le levier d’ouverture de la trappe de sortie d’urgence.
Je me jette de tout mon poids contre cette trappe qui s’ouvre et je roule dehors. Je ne vois personne d’autre s’évacuer de l’avion. Je retarde l’ouverture de mon parachute jusqu’à environ 2000 pieds, ce qui est probablement trop bas, car, à peine ouvert, je touche le sol en faisant un atterrissage très brusque. Ma jambe gauche est foulée et très douloureuse.
- Quand j’ai quitté l’avion, il n’était plus qu’une boule de feu. Cependant il était encore sous contrôle et non pas en vrille, ce qui me fit penser que le pilote et le co-pilote étaient toujours aux commandes.
- J’atterris au voisinage des coordonnées 5028-0540, à environ 6 ou 7 miles au sud est d’Aywaille. Pensant que j’étais en territoire ennemi, je cachai immédiatement mon parachute et ma veste de sauvetage dans un fourré. Peu après, je vis une femme. Il était trop tard pour me cacher car elle m’avait vu. Je lui fis signe, mais elle s’éloigna rapidement avec un chien qu’elle tenait en laisse. Je pu voir mon compas au travers du plexiglas de mon kit d’évasion et je me dirigeai vers l’ouest en utilisant un bâton, car ma jambe était en mauvais état.
- J’avais progressé d’environ un demi mile lorsque je vis une patrouille de militaires sur un half track, à un quart de mile de moi, mais trop loin pour les identifier. Je rampai vers des buissons pour m’y cacher. Ils passèrent près de moi et je les entendis parler, je reconnus immédiatement qu’ils étaient des GI,s. J’attachai un mouchoir blanc à un bâton et je l’agitai en me dirigeant vers eux.
- Au premier abord, je crus qu’ils allaient tirer sur moi car ils épaulèrent leurs fusils. Je prouvai mon identité au moyen de ma plaque d’immatriculation.
Un Lieutenant me conduisit alors à un poste de secours à Aywaille où je fus minutieusement interrogé, tandis que ma jambe était examinée.
Je ne me rappelle pas des questions qu’ils m’ont posées.
- Le matin suivant, je fus conduit à un poste d’évacuation, puis à Verviers où je passai la nuit. Je fus ensuite envoyé en train à l’Hôpital Général situé près de Paris. Le jour suivant, transfert à Cherbourg où je passai la nuit dans un train hôpital. Après une autre nuit passée à Cherbourg dans un navire hôpital, nous allâmes à Southampton, puis à l’hôpital 162, près de Lincoln.
- Je ne sais rien concernant les autres membres d’équipage.

2-  Témoignage du mécanicien de bord, le T/Sgt James A. WEBER
L’avion fut abattu par des chasseurs ennemis (FW190) le 24 décembre 1944. Du fait que les portes de la soute à bombes étaient fermées et que je tirais sur les ennemis depuis la tourelle supérieure, je ne savais pas ce qui se passait dans le fuselage et à l’arrière, sauf que le mitraillage ennemi était terrifiant dans cette section et qu’elle était percée de nombreux trous. Le Sgt HUCK fut appelé en renfort pour assister le mitrailleur latéral, le Sgt KAUSRUD. Je sais que seulement 5 de nos hommes avaient évacué l’avion quand celui-ci fut enveloppé par les flammes. Il s’agit du F/O ALVINE, du Lt George P. LANG, du Sgt YOWAN, du Sgt HASKETT et de moi-même.
- Le Sgt YOWAN, mitrailleur ventral, pourrait donner plus de détails concernant le Sgt HUCK, car il a dû ramper depuis sa tourelle ventrale et passer par le fuselage pour atteindre la trappe d’évacuation et sauter. Au moment ou j’ai sauté, je ne connaissais rien au sujet du Sgt HUCK ni des membres d’équipage autres que ceux que j’ai cités plus haut.
- Cependant, depuis mon retour à la base, j’ai appris que le Sgt KAUSRUD et le Lt MILLER, le co-pilote avaient été déclarés tués au combat.

3-  Extraits du témoignage du bombardier, le Lt George LANG
Nous avons été attaqués vers 12h15, à environ 5 miles au sud est de Liège, Belgique, à une altitude approximative de 22000 pieds. Après 4 ou 5 attaques qui semblaient aléatoires, 7 chasseurs ennemis firent une attaque frontale venant de la direction « 2 heures », légèrement plus haut que nous. Durant cette attaque, le nez et le cockpit de l’avion furent fortement touchés. J’ai immédiatement essayé de contacter le pilote et le co-pilote par l’intercom, mais je ne reçu pas de réponse. 
Il est certain que l’intercom fonctionnait à ce moment, car le mitrailleur arrière appela pour nous informer qu’environ 40 avions ennemis arrivaient derrière nous. Durant cette attaque, faite en file, notre mécanicien, le Sgt James A. WEBER déclara que notre avion était en feu et il donna l’ordre d’évacuation.

4-  Extraits du témoignage du navigateur, le F/O Samuel ALVINE
- Notre équipage était composé de 9 hommes. Il est certain que 5 d’entre eux survécurent, bien que plusieurs aient été blessés.
A ma connaissance, les 4 autres ne quittèrent jamais l’avion et on peut donc admettre qu’ils se sont écrasés avec lui. L’aile gauche était embrasée suite aux dommages causés par les avions ennemis au moteur #2. Notre charge de bombes était complète et nos réservoirs d’essence étaient remplis.
Le Sgt YOWAN, mitrailleur ventral, signala que la soute à bombes rougeoyait à cause de la chaleur provoquée par l’aile en feu. Il n’y a aucun doute que l’avion explosa juste après que YOWAN ait été parachuté.  
- Le pilote et le co-pilote ont probablement été blessés, car juste après l’attaque, j’ai regardé dans le cockpit et j’ai vu que le pare brise était parsemés de trous. Le pilote et le co-pilote avaient un visage très pâle, et ils ne firent aucun geste quand l’ordre d’évacuation fut donné.
- Je vis le Sgt KAUSRUD avec une expression de visage très bizarre, je suis presque certain qu’il a été tué instantanément.
- Le Sgt HUCK a dû être tué sur le passage à côté de la tourelle ventrale, car les projectiles avaient percé toute une ligne de trous dans cette partie du fuselage.
Schéma de la formation du 487th group le 24 déc 1944
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La section d’aile du « Lindy Lou », qui avait servi de toit aux abeilles de Mr Lemort,
retourna en Amérique en 2001. Elle est actuellement exposée au musée de la 8e Air Force à Pooler, en Georgie.
Voici une version américaine de son histoire :

Article paru le 29 mai 2011 dans le journal « BRADENTON HERALD »,
par Vin MANNIX

« Comme vestige de guerre, la section d’aile grise de 18 pieds peut ne pas impressionner les visiteurs du Mighty Eight Air Force Museum à Pooler, en Georgie.
Elle n’attire pas l’attention comme le « City of Savannah », un B-17 argenté, restauré avec passion par des volontaires.
Elle n’est pas non plus aussi fascinante que le buste en bronze de l’acteur Jimmy Steward, une icône américaine et pilote de B-24 durant la deuxième guerre mondiale.
Pourtant, si cette aile pouvait parler, elle pourrait en raconter des histoires… »

- Tels furent les mots de son donateur, Charlie Haskett, un brave retraité de 79 ans que j’ai présenté le 4 novembre 2001 dans le Bradenton Herald.

- A présent, il nous a quittés, mais je me remémorais ses paroles le mois dernier, en visitant le musée avec mon épouse et en voyant ce vestige d’une guerre lointaine qui fut un événement dans la vie de Haskett et de ceux de sa génération.
La section d’aile attira mon attention. Elle porte une plaque sur laquelle est gravé le portrait de Haskett avec son casque, ses lunettes, et son blouson de bombardier.
Cette section provenait de la forteresse volante de Haskett, le « Lindy Lou », qui explosa au dessus de Liège, en Belgique, la veille de Noël 1944.

- C’était la huitième mission pour ce mitrailleur arrière âgé de 19ans, et aussi sa dernière.
Il était de Bedford, dans l’Indiana.
« Cette aile ne nous a pas ramenés à la base, mais elle nous a maintenu dans les airs », se souvenait Haskett presqu’une décennie plus tôt, « Je n’avais jamais rêvé le la ramener ici ».

- Ce fut une journée incroyable.
Environ 57 ans après que Haskett fut abattu, son odyssée recommença lorsqu’il lut une histoire illustrée dans un périodique de l’Air Force au sujet de la ferme d’un apiculteur à Liège, en Belgique. Cet apiculteur avait fabriqué un toit pour ses ruches au moyen d’une section d’aile d’un vieux B-17.
Haskett la reconnut : c’était une partie de l’aile droite du « Lindy Lou ».
Sentant peut-être sa dernière chance de revoir les souvenirs de la vieille époque de la guerre, Haskett emmena son épouse, Wilma, et sa fille, Janice, dans un extraordinaire voyage en Europe. C’était en août 2001.
Il visita d’abord son ancienne base de Lavenham, en Angleterre, où était stationné le 487e Bomb Group.
Puis, les Haskett continuèrent vers la Belgique pour revoir la ville près de laquelle il avait été parachuté, et contempler la section d’aile une dernière fois.
Liège lui réserva un accueil de héros… et plus.
Lorsque Haskett rencontra la petite-fille de l’apiculteur, elle lui montra la section d’aile et fit un geste magnanime qui amena des larmes aux yeux du vétéran du B-17.
« C’est à vous » lui dit Anne-Marie Rouselle.
« J’étais bouleversé », dit Haskett, « J’étais ému en revoyant l’aile et en la touchant ».

- Mathilde and Marcel Schmetz étaient là. Ils ont établi un musée à Clermont, en Belgique, et ils aidèrent Haskett à expédier sa précieuse cargaison en Amérique.
« C’est seulement une aile, mais vous pouvez remarquer tout ce qu’elle représente  pour lui », dit Mathilde Schmetz, « C’est comme une part de lui-même, elle représente une histoire ». Une histoire qui est gravée dans le coeur de Haskett.

- Le « Lindy Lou » faisait partie d’une armada de 2000 bombardiers partis pour une mission très importante. C’était durant la bataille des Ardennes, l’attaque finale et désespérée 

Témoignages du Sgt Charles W. Haskett en langue anglaise

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